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Humans of Food #3
Fatema
Cheffe syrienne à Strasbourg

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Est-ce que tu as un souvenir particulier lié à la cuisine de ton enfance ?

Je me rappelle d’une pâtisserie qu’on appelle « succès », faite de biscuit et d’une sauce au chocolat. On casse le biscuit puis on y verse une sauce au chocolat et on roule le tout. Je préparais ce dessert avec ma mère. Ce n’est pas un dessert syrien, il me semble que c’est français.

Ma mère cuisinait beaucoup, elle faisait de la pâtisserie. C’est elle qui m’a tout appris. Et je crois qu’aujourd’hui je cuisine beaucoup plus qu’elle et je fais tout moi-même. En Syrie par exemple, on avait l’habitude d’acheter les Halawet el jeben . Moi, je ne les achète pas, je les fais maison.

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Quels sont les ingrédients phares de ta cuisine ?

L’ingrédient que je cuisine le plus c’est le riz. Je le cuisine avec énormément de choses. Je le cuis avec une herbe aromatique appelée molokhiya que j’achète séchée. Ça vient de Syrie. On l’effrite puis on l’ajoute au riz qui cuit dans le bouillon de poulet. C’est super bon comme ça. Asna ma fille adore le riz, surtout avec des petits pois. En Syrie on en mange beaucoup, il est généralement importé d’Égypte ou d’Inde.

Est-ce qu’il y a un plat ou une cuisine en particulier qui t’a déjà fait voyager ?

Le dessert que l’on va manger tout à l’heure, qu’on appelle hétaliyé. C’est un dessert qui me rappelle l’enfance et qui me transporte immédiatement à Alep. C’est une crème à base de lait, de mastic et de fécule de maïs. On laisse refroidir pour que ça se fige puis on sucre avec un sirop et de la fleur d’oranger. On l’accompagne d’une glace au lait — c’est bien meilleur qu’avec une glace à la vanille. C’est un souvenir marquant. Lorsque j’en mange, je me vois directement sur la terrasse et avec ma famille en Syrie. D’ailleurs, c’est un dessert qui ne se déguste pas seul mais qu’on partage à plusieurs. Seul, ça n’a aucun intérêt.

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Selon toi, est-ce que la cuisine permet de transmettre des pratiques, des traditions ou encore des héritages culturels ?

Il y a de nombreux plats syriens qui permettent de partager la culture et les traditions. Les grands-mères transmettent des pratiques de génération en génération. Je cuisine comme ma mère qui elle-même cuisinait comme sa mère. Mais à chaque fois on change des choses dans les recettes. J’y ai ajouté ma touche personnelle.

La cuisine se partage aussi avec les autres peuples et les autres cultures. Je suis contente de découvrir d’autres types de cuisine. Le restaurant dans lequel je vais travailler mélange la cuisine libanaise et la cuisine alsacienne. Bon, je n’aime pas tout dans la cuisine alsacienne, mais j’aime bien la crème fraîche. Le chef en utilise beaucoup.

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Selon toi, est-ce que la cuisine peut créer des liens entre des personnes qui viennent d’horizons divers ?

J’ai une copine égyptienne que j’ai rencontré en formation. On aime beaucoup échanger autour de la cuisine et découvrir la cuisine de l’autre. La cuisine égyptienne et syrienne ne se ressemblent pas. Mais attention, la cuisine ne met pas tout le monde d’accord. Les personnes qui ne s’entendent pas ne se réconcilie pas simplement grâce à un repas. Mais ça permet de se rassembler et de manger ensemble.

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Avec qui tu préfères cuisiner ?

Seule. [rires] Enfin, je préfère faire la pâtisserie toute seule, j’ai peur que ce ne soit pas bon sinon. Mais on cuisine quand même ensemble. Je prépare les plats, Asna les décore et Abdoul mon mari les goûte. Avant le mariage Abdoul cuisinait, il a perdu sa maman quand il était encore jeune et vivait dans une famille de garçons. Mais depuis qu’on est marié c’est fini, c’est moi qui cuisine et lui qui contrôle si c’est bien fait. [rires] Heureusement que j’aime cuisiner.

Signé : Julia Wencker
Photos : Julia Wencker

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